- BIO-RHEXISTASIE
- BIO-RHEXISTASIEBIO-RHEXISTASIEPrésentée pour la première fois par H. Erhart dans une note parue à l’Académie des sciences en 1955, la théorie de la bio-rhexistasie a été développée par cet auteur dans un petit ouvrage, paru en 1956: La Genèse des sols en tant que phénomène géologique . L’ouvrage en question ne visait alors qu’à exposer les principales observations et les raisonnements scientifiques qui ont conduit H. Erhart à l’élaboration de la théorie, et à suggérer les modifications qu’elle paraissait pouvoir apporter dans l’interprétation de certains grands phénomènes géologiques.Lorsqu’un continent composé de roches primaires, telles que granites ou basaltes, se trouve situé sous un climat très chaud et très humide, une luxuriante végétation de forêt vierge s’y installe et décompose les roches, en formant des sols latéritiques extrêmement profonds, pouvant atteindre jusqu’à 100 mètres d’épaisseur. Si la végétation est appelée à persister pendant la durée d’une période géologique, ce type de pédogenèse opère une grandiose réaction géochimique due au fait que la forêt vierge enveloppe la surface continentale comme un filtre, laissant passer les éléments chimiques solubles, mais retenant sur place les insolubles.Les éléments solubles, libérés par l’attaque des roches, se composent alors principalement d’hydroxydes, d’hydrocarbonates ou de bicarbonates de sodium, de potassium, de magnésium et de calcium, à côté de la silice des silicates qui provient de l’effondrement du réseau cristallin des minéraux silicatés. Ces éléments constituent la phase migratrice de la pédogenèse. En arrivant dans les lacs ou à la mer, ils serviront à l’édification biochimique, ou simplement chimique, des calcaires, des dolomies et des variantes silicifiées de ces roches.À cette phase migratrice s’opposent les éléments résiduels de la pédogenèse qui doivent rester en majeure partie sur le continent parce qu’ils sont pratiquement insolubles et sont retenus dans les sols par suite de la protection antiérosive de la forêt. Il s’agit principalement de la silice qui se trouve sous forme de quartz, de silicate d’alumine sous forme de kaolinite, d’hydroxydes de fer et d’hydroxydes d’alumine. Ces composants constituent la phase résiduelle de la pédogenèse latéritique.La période géologique au cours de laquelle cette grandiose réaction géochimique a pu se développer a été appelée biostasie , terme qui évoque une période de stabilité de l’écorce terrestre et d’équilibre biologique, au cours de laquelle les êtres organisés, et en particulier la végétation continentale, ont pu atteindre leur développement maximal (climax ).À la suite de variations climatiques importantes qui ont entraîné la raréfaction ou la disparition du couvert végétal forestier, l’équilibre biologique qui s’était édifié au cours des millénaires se trouvera rompu. La phase résiduelle de la pédogenèse sera livrée à l’érosion, car le filtre aura été crevé. Ce sera la période de rhexistasie (du grec rhèxis , action de rompre).La conséquence inévitable de la rhexistasie sera que, dans les lacs et dans les mers, des sédiments détritiques vont se superposer aux sédiments biochimiques formés au cours de la période biostasique précédente. Et ainsi peut-on comprendre que certains cycles de sédimentation, marine et lacustre, ne font qu’exprimer les cycles continentaux de la végétation et de la pédogenèse, alors qu’auparavant on avait recherché les causes surtout dans les variations de faciès dues à un changement dans la position des rivages et de la profondeur des eaux.Dans le domaine de la gîtologie minière exogène, une première application de la théorie a été entreprise par A. Bernard (1958) pour expliquer les faits sédimentologiques et la genèse des gîtes stratiformes de plomb et de zinc dans la région sous-cévenole. L’intérêt de la théorie pour l’étude de la genèse des gîtes métallifères en général a ensuite été souligné dans plusieurs chapitres du traité de P. Routhier (1963). Grâce à cet ouvrage, les considérations sur le bios et la pédogenèse ont été introduites fort heureusement dans l’enseignement magistral de la géologie appliquée à la recherche minière. Un grand nombre de travaux récents ont, en outre, souligné l’intérêt du concept bio-rhexistasique pour l’explication de la genèse des gîtes miniers les plus divers. On peut rappeler, à titre d’exemples, un travail de J. Fabre et R. Feys (1962) sur la genèse des charbons, un travail de H. Erhart (1962) sur le même sujet et sur le Permo-Carbonifère en général, et une magistrale mise au point de P. Pruvost (1962). L’intervention de la bio-rhexistasie dans la genèse des bauxites a été mise en lumière par J. Nicolas et ses collaborateurs (1967) et par H. Erhart lui-même (1967). Enfin, une contribution particulièrement importante pour l’application du concept bio-rhexistasique a été apportée par l’étude des gîtes uranifères. Moreau, Poughon, Puibaraud et Sanselme (1966), analysant les résultats acquis par des centaines de kilomètres de forages, ont fait ressortir le rôle des altérations superficielles et de la pédogenèse dans la formation, per descensum , de nombreux gîtes uranifères.
Encyclopédie Universelle. 2012.